mercredi 5 décembre 2007

DÉPÔT CHAUDIÈRE & FRASER BRACE

DU DÉPÔT CHAUDIÈRE À LA LOUTRE

À grand projet, grands moyens





Le projet de construction d’un barrage à la tête de la Saint-Maurice, au lieu dit La Loutre, en 1914, pouvait être qualifié, à l’époque, d’entreprise colossale, herculéenne. La seule voie d’accès au site était la rivière elle-même. Heureusement pour la Fraser Brace, chargée du projet, la nouvelle ligne de chemin de fer du Transcontinental lui fournissait un moyen d’acheminer son stock jusqu’à la réserve des Attikameks, à Wemotaci.

Un pont y avait été jeté sur la rivière, en aval de la réserve, à un endroit bientôt baptisé Weymont. La ligne, destinée à relier Québec et Winnipeg, avait jusque-là plus ou moins suivi le parcours de la Saint-Maurice. À Wemotaci, la grande voie fluviale oblique résolument vers le nord. On était encore loin de La Loutre : à plus de 130 kilomètres plus au nord. La Baie d’Hudson, qui avait un poste de traite dans la réserve, refusa à la compagnie d’y débarquer son matériel. L’opération se fit donc sur la rive gauche de la rivière, et, à en croire le missionnaire Guinard, ce sera le début de Sanmaur. La Fraser Brace érigea une digue temporaire pour faire monter le niveau de l’eau en amont et le matériel fut transporté, par barges, jusqu’au rapide Chaudière, obstacle majeur, infranchissable pour les embarcations.



Comme je ne suis pas allé consulter la moindre source primaire, je me demande si c’est la Fraser Brace qui a fondé (un bien grand terme) Chaudière ou s’il y avait déjà un campement établi par la Brown Corporation. Chose certaine, l’entreprise de construction y organisa un dépôt et commença l’installation de la ligne de chemin de fer qui allait lui permettre de poursuivre la livraison de ses matériaux jusqu’à La Loutre.

Achetée par la Brown Corporation et démantelée, la ligne a servi de route vers le barrage Gouin. De toute évidence, son démantèlement se sera fait à la fin des années 1930 ou au début de la décennie suivante. Mon oncle, Steven Lee, qui habita avec nous à Chaudière, de l’automne 1947 à la fin de l’été 1948, m’affirme qu’il n’a jamais vu ce tronçon, lui, qui a pourtant occupé plusieurs emplois dans les environs. D’ailleurs, soutiennent certains, on peut encore trouver des vestiges, rails et dormants, qui en rappellent l'existence.



Peut-être trouverai-je dans le petit journal tenu par Jerry McCarthy, qui a travaillé à La Loutre de 1919 à 1957, une date plus précise de ce démantèlement. J’en ai une copie que m’a aimablement envoyée son petit-fils Patrick. Plusieurs photos, datées, montrent des véhicules qui ont emprunté cette voie ferrée : camions et camionnettes, draisines.

Paul Tremblay m’a généreusement fourni plusieurs photos de cette voie ferrée, dont celles qui figurent ici. C’est sans doute dans l’un de ces camps que nous logerons, ma mère, mon frère et moi lors de notre bref séjour à cet endroit. Il y a lieu de penser que les bateaux chargés de stock, sur la photo, sont de ceux utilisés par la Fraser Brace.

Note - Une brève notice consacrée au bureau de poste de La Loutre par un philatéliste donne le contexte du début des travaux de la Fraser Brace. L'auteur réfère aux mémoires de Guinard, déjà cités dans ce carnet. Voir http://www.hdphilatelist.com/LoutreDam.pdf. J’y reviendrai, puisant de nouveau dans les mémoires du missionnaire oblat.